Au bout de leur canne en métal creuse, ils insufflent la vie tels des démiurges créateurs. Jouer avec les flammes, la gravité. Fondre, étirer, tourner, rouler, maillocher, trancher, refroidir, recuire. Transformer la masse de verre en fusion. Donner naissance à une sculpture. S'imprégner de sa transparence qui laisse diffuser la lumière. Bienvenue dans l'antre alchimique de Léonie et Erwann, souffleurs de verre passionnés.
Leowannglass
Si, en cette année 2020, pour certains tout s'est arrêté pendant le confinement dû au virus Covid, pour Léonie et Erwann c'est là que tout a commencé. Ils sont en Bretagne. Pour se faire plaisir, s'occuper, ils se mettent à créer quelques bijoux avec le chalumeau de Léonie. Ils les exposent sur internet et très vite ils provoquent un bel engouement. Petit à petit, l'idée de créer leur propre entreprise s'instille alors dans leurs esprits. Ils prennent les renseignements à la chambre des métiers, s'inscrivent à la formation de 2 jours pour les nouveaux entrepreneurs et immatriculent « Leowanglass » en juin 2021. C'est Erwann qui crée leur logo. Je dois avouer que le premier contact avec leur carte de visite, a suscité en moi une émotion intense. L'écriture employée est celle de la calligraphie sacrée apposée sur les icônes. Toutes les lettres s'inscrivent dans des colonnes verticales, symboles du lien entre la Terre et le Ciel. Quand j'évoque cela avec lui, il est très étonné car il n'a aucune connaissance dans ce domaine... Ou comment on est parfois inspiré sans même s'en rendre compte !!!...
Le succès de leurs bijoux est tel qu'aujourd'hui leur stock n'est pas assez conséquent pour répondre à la demande, la plupart sont déjà en rupture !
Il faut dire qu'avec des noms aussi évocateurs que «Matière noire», «Nébuleuse», «Lagon», «Écume», «Mars», cette joaillerie en pâte de verre doit avoir le pouvoir de nous faire décoller des vicissitudes du quotidien ! Pas étonnant que les gens se ruent dessus !
Quand on a le pouvoir de faire rayonner dans la matière tant de beauté, d'inscrire toute cette poésie dans ces accessoires d'embellissement, de souffleurs de verre ils deviennent souffleurs de vers !...
Naissance d'une passion : Erwann
Chronologiquement, Erwann étant le plus âgé des deux, c'est chez lui que la passion s'allume en premier. En 4ème, il regarde l'émission «C'est pas sorcier» sur le verre. Cette matière en fusion qu'on peut modeler à sa guise a tout de suite retenu son attention.
Il réalise un stage d'une semaine chez Gérard Torcheux. C’est la révélation ! Ce matériau le séduit totalement. Son brillant, son éclat, ses couleurs, sa transparence, sa lumière, c'est comme une magie qui le transporte. Il y a un petit côté alchimie dans tout ça qui plaît beaucoup à Erwann... Souffleur de verre est un métier initiatique qui se transmet avec des maîtres ! Transformer la matière pour en révéler et en partager la beauté, c'est ce qu'il veut offrir au monde.
Il se forme au lycée Jean Monet à moulins dans l'Allier. Il y passe un un Brevet Métiers d'Art, directement après la troisième. Il travaille à la cristallerie Baccarat, excusez du peu, pendant 2 ans. Mais très vite il sent qu'il a envie de quelque chose de plus créatif, de plus artistique.
Il part alors sur l'île de Bornholm au Danemark pendant 3 ans pour suivre un cursus qui le mène au bachelor design, créativité et développement de projet. Cette école, qui forme des céramistes et des souffleurs de verre, créée en 1998 est reconnue dans le monde entier. L'entrée se fait sur test d'admission et est très sélective ! Cette île est renommée dans tout le Danemark. Son environnement naturel exceptionnel est propice à l'inspiration, son dynamisme et son bouillonnement créatif attirent les artistes de tous pays. Erwann intègre ensuite l'atelier d'un verrier réputé au Danemark. Durant ces années danoises, Erwann n'a pas appris la langue du pays, mais il s'est considérablement amélioré en anglais, me dit-il !
Naissance d'une passion : Léonie
En 3ème, Léonie ressent avec une certaine angoisse la pression du choix qu'elle doit opérer pour son avenir professionnel. Ce qu'elle sait c'est qu'elle veut travailler de ses mains.
Elle réalise quelques stages en marqueterie et en bijouterie. Un jour elle rencontre un chalumiste. A l'aide de son chalumeau, il lui crée une licorne en verre. Elle est estomaquée de cette transformation de la matière, dans laquelle elle y voit de la magie à l’œuvre.
C'est le déclic, elle sera souffleuse de verre. Léonie passe un Brevet des Métiers d'Art à Sarrebourg, directement après sa 3ème. Elle part ensuite en stage à Belle-Île-en-Mer. Lors d'un festival de verriers, elle rencontre une danoise. L'entente est immédiate et quelques temps après, celle-ci lui envoie un mail pour lui dire qu'ils ont besoin de quelqu'un 2 mois plus tard. Le délai est court, la décision doit être rapide. Ça tombe bien la rapidité est une qualité indispensable aux souffleurs de verre et Léonie n'en n'est pas dépourvue ! Ni une ni deux, n'écoutant que son cœur, elle quitte tout en France et s'envole, à 19 ans, explorer l'île Bornholm. Tiens, tiens... Elle y passe 2 ans. Son rêve est d’œuvrer au côté de Tobias MØHL, souffleur de verre danois dont elle adore le travail. Elle propose sa candidature dans son atelier, mais ils ne peuvent pas l'employer de suite car ils ont déjà un assistant. Pour autant, elle est quand même accueillie en stage 1 mois. Elle rencontre alors l'assistant en question... Et vous l'avez deviné c'est...(roulement de tambour) Erwann !
J'adore cette histoire. Imaginez un peu comment les mains du destin s'organisent pour faire se rencontrer ces deux-là. Voyez un peu... Chacun poursuit son bout de chemin en suivant ses inspirations, on peut les suivre à la trace. L'un est à Moulins puis chez Baccarat et enfin sur l'île de Bornholm et chez Tobias MØHL. L'autre est à Sarrebourg, puis à Belle-Île et enfin au Danemark et chez Tobias MØHL. Et là, étincelle ! Du verre en fusion à la fusion de leurs deux êtres. Merci Tobias ! En plus de créer des œuvres magnifiques, tu permets l'éclosion d'un amour véritable !
Souffleurs de rêve
Leur aventure continue désormais à deux. En 2019 c'est le retour à Belle-Île, une opportunité s'est ouverte pour eux. Ils travaillent dans une entreprise de la région. Puis badaboum, le Covid arrive en grandes pompes et le confinement passe par là. Loin de les décourager, ils se mettent à rêver... Et si on s'aménageait un camion ? Quoi de plus normal que de s'espérer libres, bloqués dans un appartement ! Telle une de leur création en verre, l'idée prend forme, se peaufine, se malaxe, s'étire et finalement s'ancre dans la matière.
Et la Vie, qui s'arrange pour leur offrir le camion correspondant à tous leurs critères, près de chez eux, livré, la totale quoi ! Alors, encouragés l'un par l'autre, ils se soutiennent mutuellement et passent leur permis poids lourd. Deux semaines de formation intensive entre Noël et Nouvel-An. Ils sont très motivés, le camion les attend. Léonie est un peu timide au début, puis très vite elle prend ses marques. Et finalement elle trouve génial de pouvoir conduire ces gros engins ! Ils décrochent magistralement tous les deux leur permis du premier coup ! Erwann d'abord puis Léonie quelques jours plus tard.
Quel beau cadeau !
En janvier Léonie perd son emploi de manière brutale. Cela précipite la décision d'Erwann de quitter aussi son entreprise qui ne lui apportait plus beaucoup de satisfactions depuis un petit moment déjà. Fin mars ils disent au revoir à la Bretagne.
Ils embarquent le camion, chargé de tout le matériel qu'ils ont accumulé pour l'aménager, la voiture également pleine à craquer et le chien. Le convoi se déplace jusqu'en Alsace chez le père de Léonie.
Ils y restent 6 mois, consacrés exclusivement à l'aménagement du camion.
Et quand je vois le résultat, je me dis que si un jour ils veulent changer de voie, celle-ci est toute trouvée !!!
En suivant les aspirations de leurs âmes et en les réalisant dans la matière, de souffleurs de verre ils deviennent souffleurs de rêves...
Et maintenant ?
Ces deux dernières années ont été très intenses pour Léonie et Erwann. Aujourd'hui ils souhaitent ralentir un peu. Vivre une vie authentique où prendre le temps est essentiel à leurs yeux, eux qui doivent faire montre d'une grande rapidité d'exécution dans leur métier de souffleurs de verre. Un équilibre à trouver pour une vie volontairement empreinte de sobriété heureuse. Prendre du temps pour eux, pour profiter de la douceur de vivre, de leur chien. Prendre le temps de créer. Prendre le temps d'un tour de France avec leur camion, sans plan de route. Se laisser inspirer. Être à l'écoute de leurs besoins profonds.
Et après ?
Leur projet, peut-être en 2022 : le retour au Danemark. Ils aiment l'environnement porteur là-bas. Et la chaleur des fours y est peut-être plus supportable qu'ailleurs ! L'ambiance est détendue, coopérative, propice à l'innovation. Les métiers d'art et d'artisanat y sont très valorisés. Ils se sentent très imprégnés du design scandinave aux lignes épurées. Cela correspond bien à la simplicité et la beauté qu'ils développent dans leur vie. Ils se voient bien louer des ateliers pour souffler le verre à la canne, c'est ce qu'ils aiment par dessus tout. Continuer de progresser, expérimenter et créer des grosses pièces.
Devenir des souffleurs de verre faisant émerger leur propre univers et nous le partager.
J'ai hâte !
Ce voyage en compagnie de Léonie et d'Erwann me relie à de beaux souvenirs.
Tout d'abord dans mon enfance... Je me souviens de ma collection d'animaux en verre soufflé offerts à chaque occasion par ma marraine amoureuse des belles choses.
Elle fait aujourd'hui le bonheur d'autres collectionneurs, mais je me souviens de la joie que j'avais à déballer les petits paquets pour découvrir la nouvelle pièce qui allait orner mon étagère. Tout m'émerveillait, la forme, la délicatesse, la fragilité, la transparence, la couleur...
Les oiseaux avaient ma préférence...
Mais aussi plus tard, à la trentaine lors de ma période de créatrice de bijoux. J'adorais utiliser les perles en pâte de verre pour confectionner des colliers et boucles d'oreilles originaux. La variété de leur couleurs, de leur forme, leur transparence, m'ont toujours fascinée. C'est pourquoi je comprends profondément l'amour de Léonie et Erwann pour ce matériau magnifique.
Ce moment d'échange avec ces deux souffleurs de verre fusionnels me remplit d'une grande joie. Et me rappelle combien il est précieux de savoir apprécier les petits bonheurs de l'instant présent.
En hommage à la façon dont Léonie et Erwann traversent la vie, je vous partage mon poème
«Prendre le temps»
«Prendre le Temps
D’aller, de revenir
De regarder, de ressentir
Prendre le Temps
De s’ouvrir
De chercher
Prendre le Temps
De l’enchanteresse Solitude
Prélude à la Béatitude
Prendre le Temps
De la Lenteur
Plonger en Profondeur
Prendre le Temps
De quitter le Reflet
De naviguer dans le Vrai Prendre le Temps
De co-naître
Voyager vers l’Être
Prendre le Temps
De la Danse
Jusqu’à la Transparence Prendre le Temps
De soulever les voiles
A la rencontre des Étoiles
Prendre le Temps
Du lever de Soleil
Subtile sensation d’Éveil Prendre le Temps
Du coucher de Soleil
Pénétrer son invisible Veille
Prendre le Temps
De lire en son Corps
Les traces de la Poussière d’Or Prendre le Temps
Depuis la Terre
D’écouter le chant des Sphères
Prendre le Temps
De monter
De rejoindre le Sommet Prendre le Temps
De redescendre
Partager «l’ins-tendre»
Prendre le Temps
Du Détour
Qui ouvre la Coupe de l’Amour Prendre le Temps
D’aimer
De semer la Paix
Prendre le Temps
Jusqu’au Bout
De vivre le Rien… du Tout» © Sylvie Curioz mars 2009
«Leowannglass»
Retenez bien ce nom, on n'a pas fini d'en entendre parler !
Vous pouvez les retrouver sur leur chaîne YouTube pour les suivre sur la route et dans leurs aventures alchimiques.
Respirez la poésie de leurs créations sur Instagram
Si vous n'êtes pas rassasiés, il y a encore Twitter
Et pour commander des bijoux, c'est sur leur site et c'est par là !
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