Après avoir traversé ma peur du vide en franchissant la passerelle à Farinet à Saillon, dans le canton du Valais en Suisse (lire l’article), je me suis demandé si j'étais vraiment libérée de cette peur, comme j’en ai la sensation.
Il est évident que je ne pourrai le savoir qu’en me trouvant à nouveau dans une situation semblable.
Et bien j’ai été servie ! Deux jours plus tard, la vie facétieuse me donne l’occasion de le vérifier.
Pour rejoindre la Suisse depuis mon village de Haute-Savoie, je passe par Chamonix et le col des Montets. C’est une route que je connais bien et que j’adore, tant elle est époustouflante de beauté.
Je l’ai empruntée souvent et à chaque fois je me dis qu’un jour je randonnerai dans le massif des Aiguilles Rouges, que l’on traverse.
En revenant du Valais après mon aventure au-dessus de l’abîme, je ressens l’appel plus fort que d’habitude. Un élan profond m’incite à ce rendez-vous avec cette montagne, maintenant.
Je rentre chez moi, prends un jour d’intégration pour laisser s’ancrer le changement intérieur induit par le challenge de Saillon et me voilà prête pour mon corps à corps avec les rochers de gneiss.
Me laisser guider par mon intuition
Je n’ai pas décidé d’une randonnée particulière, j’ai juste envie d’arpenter les sentiers, ressentir l’atmosphère si particulière de ce lieu et suivre mon intuition.
Après avoir garé ma voiture au col, je lis les panneaux et choisis de prendre sur la droite en direction du vallon de Bérard.
Je me fonds dans les couleurs automnales des mousses et des végétaux, m’imprègne de la résistance des cailloux sous mes chaussures, me réjouis du brame d’un cerf dans la forêt toute proche.
La nature pétille de toute part et moi avec ! La joie est palpable.
Arrivée au vallon, je sens que j’ai encore envie d’avancer un peu.
Je vois que la « Cascade de Bérard » est à portée de pas, alors ni une ni deux, je poursuis dans cette direction.
Quelle n’est pas ma surprise en approchant du lieu, de découvrir un écriteau mentionnant « Grotte à Farinet » !!! C’est vraiment croyable (depuis de nombreuses année j’ai banni le mot « incroyable » de mon vocabulaire, tant j’ai vécu de moments défiant l’entendement)!
Deux jours auparavant je marche dans sa trace en Valais et me voici, de manière tout à fait inattendue, à nouveau en lien avec lui ! Je n’en reviens pas !
Farinet est connu comme une sorte de Robin des Bois, un troubadour de la liberté, faux-monnayeur au grand cœur parce qu’il distribuait ses pièces contrefaites aux pauvres. Poursuivi par les forces de l'ordre, il a été retrouvé mort dans les gorges de la Salentze, à Saillon, en Valais.
Je ne me doutais pas une seconde que ses pas l’avaient conduit dans cette vallée de Vallorcine et qu’il était aussi connu de ce côté de la frontière.
J’éclate de rire tant je trouve la vie malicieuse.
Et je ne suis pas au bout de mes surprises !
A nouveau confrontée à ma peur du vide
Je me dirige donc vers cette grotte que j’ai hâte de visiter.
En m’approchant, j’entends le grondement de la cascade qui est toute proche.
Au détour du chemin, je me retrouve nez à nez avec le rideau d’eau... et avec une magnifique passerelle en métal pour y accéder. Passerelle, vous vous en doutez, accrochée à la paroi, au-dessus des gorges !...
Mon rire reprend de plus belle, je comprends que je suis mise à l’épreuve !
Je vais très vite savoir où j’en suis de ma peur du vide !
Je m’approche donc du bord... Et je constate que je peux regarder vers le fond sans aucune appréhension. Je pose un pied sur la passerelle, dont le sol est tout de même en grillage ajouré, offrant une vue splendide sur le gouffre... Et rien ne se passe, tout est calme à l’intérieur... Pas de respiration haletante, de quinte de toux asthmatique, pas de jambes qui flageolent... Rien. Je vais, je reviens, je filme, je regarde à droite, à gauche, en haut, en bas... Rien.
Wouaaaaaaah ! Quel bonheur ! Quelle légèreté ! Ma libération est confirmée !!!
Je me sens pousser des ailes et continue d’avancer (de voler ?) jusqu’à la grotte, à laquelle on accède, soit dit en passant, en grimpant et descendant le long d’escaliers bien raides fixés aux rochers, proches du ravin.
Si j’étais venue là deux jours plus tôt, je ne serais jamais parvenue à l’entrée de la cachette à Farinet !
Cette caverne est une belle récompense, l’aboutissement du chemin parcouru, à la fois intérieur et extérieur.
Je me sens ramenée en mon centre, dans mon ventre, en sécurité, protégée dans l’utérus de la Terre-Mère.
Je n’ai plus peur du vide, réel ou symbolique.
C’est la nouvelle lune. Je suis bien, je suis là, vivante. Merci.
header.all-comments